Apple, Samsung, Xiaomi, Withings… ce sont les sociétés qui investissent le marché de la santé avec leurs montres connectées capables de réaliser des ECG (électrocardiogramme). Une « révolution absolue pour la cardiologie», selon le Pr Pierre Bordachar, responsable du service de stimulation cardiaque et défibrillation du CHU de Bordeaux et directeur Formation de l’IHU Liryc, qui s’enthousiasme à l’idée de donner accès à des millions de personnes en temps réel, aux données d’un ECG de surface.


Cet investissement dans la santé des grosses sociétés internationales est une vraie bonne nouvelle, catalyseur d’innovation dans le secteur. D’autant plus que ces sociétés ont choisi l’électrophysiologie, à forte valeur symbolique de vie et/ou de mort, pour s’installer sur le marché de la santé.

Comment cela fonctionne ?


Concrètement, les montres mesurent l’activité électrique du cœur ; c’est-à-dire l’impulsion électrique qui traverse le cœur pour permettre sa contraction, grâce à deux électrodes, une placée sous la montre au contact du poignet et une seconde au niveau d’un bouton pressoir. Elles vérifient une seule dérivation, un seul « point de vue » de l’activité électrique, permettant de détecter une éventuelle fibrillation atriale.

Si la montre détecte un problème, elle affiche un message préventif de suggestion de fibrillation auriculaire, et invite à consulter rapidement un spécialiste. La fibrillation atriale, c’est l’arythmie la plus fréquente, caractérisée par une contraction anarchique et inefficace de l’oreillette, ce qui favorise la formation de caillots sanguins.

Des challenges pour la profession


Selon le Pr Bordachar, l’urgence est désormais de se préparer – cardiologues, équipes médicales et paramédicales, enseignants, étudiants, chercheurs – pour une modification en profondeur des pratiques.


Dans un premier temps, sur le volet technique, les montres ne permettent l’enregistrement que d’une seule dérivation, D1, contre douze pour les dispositifs habituels. La question soulevée par le Pr Bordachar ici, est donc de savoir précisément ce que l’on peut détecter avec l’enregistrement d’une seule dérivation et ce que l’on peut manquer. En effet, dans un ECG, c’est la pluralité des points de vue de la même activité électrique, fournie par les 12 dérivations, qui permet un constat médical.


Dans un second temps, l’accès à ces données par le public, à priori non-expert, nécessiteune formation. Il est question non seulement de former les utilisateurs de la montre à leur compréhension, mais également l’ensemble du corps médical, spécialiste et non spécialiste à lire les données. Le Pr Bordachar, sous sa casquette de Directeur Formation à l’IHU Liryc, insiste sur les différents volets de formation : les futures générations de cardiologues, les médecins généralistes, les personnels paramédicaux, etc. L’idée est que chacun soit capable d’avoir une lecture des données fournies et puisse accompagner les patients dans cette approche.


Finalement, ces montres ouvrent tout le champ des possibles dans le domaine de la recherche. Les montres surveillent également automatiquement toutes les deux heures et sans intervention particulière le rythme cardiaque (le pouls) de son propriétaire. On aperçoit ici la richesse de ces données pour mieux comprendre le cœur et son activité électrique. Couplées aux données de télémédecine, c’est une aubaine pour multiplier les angles de vue.

Une étude au CHU de Bordeaux pour se préparer


On imagine aisément que de nombreuses sociétés investiront le domaine dans un futur proche. Les équipes du Pr Bordachar prennent déjà ce virage, en menant une étude indépendante.
Cette étude inclut 250 patients, équipés de montres connectées avec des pathologies cardiaques très diverses, plus ou moins rares.
Les patients sont également soumis à des examens cliniques classiques, comme les fameux ECG 12 dérivations.
Les tracés des montres sont ensuite soumis à l’aveugle à un cardiologue, qui essaie de poser un diagnostic à partir des données récoltées.
L’objectif ici est de savoir quelles informations révèlent la montre et quelles sont celles manquantes au diagnostic.


En résumé, les montres connectées mesurant l’ECG viennent déjà révolutionner les pratiques cliniques.
Le développement constant de cette santé connectée laisse même rêveur, avec à terme une intelligence artificielle capable peut-être d’établir un premier diagnostic sur la montre.
Autant de bruit qui permet par ailleurs de sensibiliser le public aux troubles du rythme cardiaque. Rappelons que les maladies du rythme cardiaque sont un réel enjeu de santé publique, avec pour la seule fibrillation atriale 33,5 millions de personnes touchées dans le monde.

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